Face aux défis du changement climatique, toutes les solutions pour réduire notre impact sont envisagées. Parmi elles, le stockage du CO2 serait une alternative qui permettrait de réduire la concentration de CO2 dans l’atmosphère. Retour sur les techniques en développement pour « piéger » le CO2.
Réduire la production industrielle, transformer nos manières de consommer, trouver des alternatives énergétiques ou créer des innovations durables… Les pistes pour réduire notre impact sur le dérèglement climatique sont nombreuses. Pourtant, encore aujourd’hui, la plupart sont difficiles à mettre en place, pour des raisons structurelles, économiques et parfois politiques. C’est pour cette raison que d’autres solutions sont envisagées, et notamment la question du stockage de CO2.
Le stockage de CO2 part du principe que si l’on ne peut pour l’instant empêcher nos activités d’émettre du CO2, on doit pouvoir empêcher ce gaz de se disperser dans l’atmosphère et le stocker quelque part. Selon l’Agence Internationale de l’Energie, cette technologie pourrait à l’avenir se révéler indispensable dans la lutte contre le réchauffement climatique, et contribuer jusqu’à 13% aux objectifs de réduction du CO2 d’ici 35 ans.
Comprendre le captage et le stockage du CO2 (CSC)
Le CSC comprend trois étapes principales :
- Le captage du CO2, qui représente le plus gros défi technique et financier
- Le transport du gaz
- Et son stockage dans un environnement adapté
L’objectif est de stocker le gaz dans le sous-sol, notamment dans des anciens sites pétroliers ou gaziers déjà exploités, des veines de charbon ou des réserves d’eau salées. Dans ces environnement, le CO2 serait en principe piégé, sans danger pour l’homme et l’environnement.
En effet, si les conditions géologiques sont réunies (pression, qualité chimique des sols, stratification rocheuse appropriée) le gaz est véritablement piégé et ne peut pas remonter à la surface. Si l’on l’injecte dans des veines de roches charbonneuses, il est alors absorbé par la roche et ne peut plus migrer vers l’atmosphère.
Une autre possibilité serait de stocker le CO2 dans l’océan. On sait d’ores et déjà que l’océan est l’un des plus importants lieu de régulation du cycle du CO2 sur Terre. Une grande partie du CO2 est absorbée par les eaux marines, et est ensuite consommé par divers organismes marins (le plancton notamment). L’idée serait de profiter de ce mécanisme naturel en stockant une partie du CO2 capté en profondeur dans l’océan, mais les conséquences écologiques d’une telle pratique sont encore à l’étude.
Bref, sur le papier, le CSC a de quoi séduire, même s’il faut rester attentif.
L’état du captage et stockage du CO2 dans le monde
Aujourd’hui, 12 projets de Captage et Stockage du CO2 sont d’ores et déjà opérationnels dans le monde (7 aux Etats-Unis, 2 au Canada, 2 en Europe et 1 en Amérique du Sud) et 23 sont en construction ou en préparation. En Europe, la Norvège est à la pointe avec près de 16 millions de tonnes de CO2 injectées dans un aquifère salin profond sur les 50 millions de tonnes déjà injectées à ce jour.
Le problème d’une telle technique c’est qu’elle ne dispose pas d’un réel modèle économique viable. En Norvège, le système fonctionne relativement bien grâce à l’existence d’une taxe carbone qui sert d’incitatif pour les industriels. En Europe, d’après Catherine Truffert, conseillère auprès de la direction scientifique du BRGM, le système du marché des quotas de carbone n’est en revanche pas suffisamment mûr pour servir d’appui au CSC. Dans le reste du monde, faute d’incitatif, le CSC nécessite une forte capacité d’investissement qui n’a pas forcément de plus value immédiate. Aujourd’hui, faute de développements suffisants et de connaissances appropriées, seul 0,1% des émissions annuelles sont captées et stockées dans le monde. D’où la nécessité d’une forte implication des pouvoirs publics dans un développement éventuel de cette technologie.
C’est notamment le captage qui nécessite des investissements financiers important. Si l’on sait déjà relativement bien transporter le gaz (avec la technique de la compression du gaz ou le transport par gazoduc) et l’enfouir, il est plus difficile de le capter. Pour extraire le CO2 d’un hydrocarbure, il existe plusieurs techniques (pré-combustion, post-combustion, oxycombustion) mais ces techniques coûtent cher, et elles représentent 80% du coût total du CSC en moyenne.
En France, c’est sur le site de Lacq Rousse qu’un projet de CSC a été testé de 2010 à 2013. Il a permis d’enfouir près de 50 000 tonnes de CO2 dans un ancien gisement de gaz épuisé. Financé par Total, le projet a coûté près de 60 millions d’euros.
Le stockage du CO2 est il viable à long terme ?
Est-ce une technologie viable à long terme ? D’après les géologues, oui, mais des craintes existent : acidification des sous-sols, modification de l’environnement chimique, activité sismique qui modifierait la structure du sol et permettrait au CO2 de remonter d’un coup… Au moment de sa mise en place, le projet de Lacq Rousse a suscité bien des inquiétudes et des polémiques et on peut penser que ce type d’installation sera de toute façon difficile à mettre en place, démocratiquement parlant.
Le stockage du CO2 n’est pas encore une technologie parfaitement mature, mais elle suscite aujourd’hui des espoirs et des interrogations. Peut-elle servir à réduire durablement notre impact sur le changement climatique ? C’est ce que pense le GIEC à condition de développer les conditions d’un marché viable.
Source : e-RSE