Ancien pôle industriel du Sud de la Suède, Malmö est considérée aujourd’hui comme étant l’une des villes les plus “vertes” d’Europe. En quelques décennies, elle a su surmonter une désindustrialisation difficile et se réinventer comme “une ville de la connaissance” et en harmonie avec l’environnement. Pistes cyclables, jardins suspendus, panneaux solaires, commerce équitable : Malmö semble être désormais un modèle à suivre pour rendre plus durables les milieux urbains européens.
La fin des chantiers navals
Même l’office du tourisme suédois en convient : Malmö n’a pas toujours été la ville durable et écologique qu’elle est aujourd’hui. “Si vous aviez visité Malmö à la fin des années 1980, vous auriez ressenti l’onde de choc provoquée par le licenciement de milliers d’ouvriers du chantier naval de Kockum et l’atmosphère de désespoir et de déclin qui pesait sur la plus grande ville de la province de Scanie”, lit-on sur le site “Visit Sweden”. Il y a trente ans, en effet, Malmö n’était pas encore une “ville du futur”, comme on l’appelle aujourd’hui. Son quartier “Västra Hamnen”, littéralement “Port occidental”, hébergeait encore les établissements du chantier naval et de l’usine Saab, et Malmö était l’un des pôles industriels les plus importants du pays.
Mais à partir des années 1990, suite à la fin de l’âge d’or industriel, cette troisième ville de Suède (après Stockholm et Göteborg) traverse avec ses 300 000 habitants une période de grands changements. En 1995, démarre la construction du pont de l’Øresund. Il relie, depuis 1999, la commune de Malmö avec Copenhague au Danemark : le projet, qui a coûté quelques 3 milliards d’euros, couvre une distance totale de près de 8 kilomètres à travers l’étroit de l’Øresund. En 1998, c’est l’Université de Malmö qui voit le jour, permettant aux étudiants locaux de poursuivre leurs études dans la ville : elle compte aujourd’hui environ 15 000 inscrits. Enfin, le quartier de Västra Hamnen devient le “BO–01”.
BO–01, le quartier 100% vert
En 2001, à l’occasion de l’exposition européenne de l’habitat, la municipalité de Malmö dévoile le nouveau visage du Port occidental. Urbanisme, architecture et environnement sont repensés sur une dizaine d’hectares, proposant aux Suédois et aux Européens un “quartier modèle”, 100% vert. Les usines désaffectées, les hangars et les espaces industriels laissent leur place à des pistes cyclables (490 kilomètres sur l’ensemble de la ville), un système de collecte d’eaux pluviales, des espaces verts (installés même sur les toits), un gratte-ciel moderne (le Turning Torso), des panneaux solaires et photovoltaïques qui alimentent les maisons ou encore un système de tri sélectif qui permet de produire du gaz naturel à partir des déchets organiques des ménages.
Il s’agit d’un passage “d’une ville industrielle à une cité de la connaissance en 15 ans”, se félicite la municipalité de Malmö. Après le BO–01, de nouveaux quartiers écologiques ont vu le jour dans l’ancien Port occidental et plusieurs indicateurs confirment en effet le succès de l’expérience suédoise. Un quart des déplacements en ville se fait en vélo (40% lorsqu’on parle des trajets pour se rendre au poste de travail), 60 000 logements sont alimentés par l’énergie éolienne produite dans l’étroit de l’Øresund et les habitudes des habitants semblent aussi tourner autour du durable et de l’éthique. Entre 2006 et 2012, assure la mairie, “la consommation de café provenant du commerce équitable est passée de 0,5% à 60%”.
Un modèle parfait ?
D’ici 2030, la ville de Malmö s’est fixée comme objectif de n’utiliser plus que des énergies renouvelables et, étant donné les excellents résultats enregistrés depuis les années 1990, le pari ne paraît pas intenable. Dans une ville qui compte par ailleurs 27% d’étrangers (et où 164 nationalités sont représentées), une prise de conscience environnementale s’est déjà développée. Cependant, le “modèle Malmö” n’est pas exportable partout dans le monde (car il nécessite de grands financements publics) et présente aussi quelques défauts. Lari Pitkä-Kangas, un élu de la ville chargé de l’écologie urbaine et du développement durable, a confié au quotidien français Le Télégramme que, dans les nouveaux quartiers dits “écologiques”, les loyers sont de 15 à 30% plus élevés que dans le reste de la commune.
C’est la loi du marché, mais cette expérience verte demeure donc réservée aux plus riches. Ceux qui, non sans ironie, sont les moins attentionnés en termes de consommation électrique. Les habitants du Port occidental utilisent en effet plus d’énergie que prévu, ce qui a emmené la municipalité “à sensibiliser davantage la population” et à “investir encore plus dans l’efficacité énergétique”, comme rapporte Euronews. Les élus de Malmö ont en effet adapté leur tactique au fil du temps : “dans le nouveau quartier de Fullriggaren, bâti entre 2010 et 2012 – affirme la mairie – pas de moins de 200 des 600 logements construits sont des maisons passives”, c’est-à-dire des habitations dont la consommation d’énergie est très faible, voire entièrement alimentée de façon autonome.
Même si ce modèle n’est pas parfait, Malmö a sans aucun doute réussi sa transformation, après une désindustrialisation qui avait laissé une ville morose et à laquelle on ne prédisait pas un bel avenir. A l’heure où les leaders du monde se réunissent à Paris pour trouver une solution au changement climatique, le projet-pilote de Malmö demeure une expérience inspirante et qui pourrait insuffler de nouvelles idées.
Source : Toute l’Europe